By: Gary Storey
On peut définir l’agriculture comme la science et l’art de cultiver la terre pour les récoltes, ainsi que d’élever des animaux ; l’alimentation, elle, concerne toute substance que le corps absorbe pour sa nutrition. Le but principal de l’agriculture est de produire de la nourriture et de la fibre. La production alimentaire du Canada est devenue très spécialisée, et moins de 4% de la population est directement impliquée dans la production agricole. Il est donc important de considérer la production de nourriture et de fibre comme un système complexe qui combine les ressources pour offrir des produits de base. Le système doit assembler ces produits agricoles de base pour les convertir en nourriture et en fibre, qui sont distribuées à des consommateurs et usagers situés loin de la source de production initiale. La Saskatchewan, de par son vaste territoire et sa population peu nombreuse, est une grande productrice excédentaire de produits alimentaires bruts et traités. Nous allons maintenant voir comment ce système de production agricole a commencé, comment il a évolué, et quelles sont les conséquences de cette évolution.
Avant la colonisation européenne, des populations autochtones occupaient la région que nous appelons à présent Saskatchewan. Il s’agissait surtout de chasseurs et de cueilleurs ; en face des ressources alimentaires provenant du bison, de divers autres animaux et des oiseaux, ainsi que des plantes et fruits indigènes, leur petit nombre ne nécessitait pas un système de production agricole développé pour subvenir à leurs besoins. Cela ne veut pas dire qu’il n’existait pas de production agricole : avant les traités des années 1870, quelques populations autochtones avaient commencé à faire des récoltes et à élever du bétail en Saskatchewan ; mais ce n’était rien comparé à la transformation que la prairie indigène allait subir à la suite de la colonisation. Les Européens commencèrent à émigrer en Amérique du Nord au début du 17ième siècle. Louis Hébert, arrivé au Québec en 1617, défricha des terres et devint ainsi le premier fermier non autochtone. Mais il fallut presque 300 ans pour qu’on s’intéresse à l’ouest en tant que région à exploiter. Cet intérêt vit le jour avec les commerce des fourrures (FUR TRADE). En 1670, Charles II d’Angleterre accorda une charte à des marchands de Londres pour établir la Compagnie de la baie d’Hudson (CBH), qui devait se livrer au commerce dans la Terre de Rupert, comprenant le territoire dont les fleuves se jettent dans la baie d’Hudson et la baie James. Comme le commerce des fourrures et l’agriculture étaient incompatibles, l’industrie de la fourrure peignit l’ouest comme un désert froid, désolé et inhabitable ; cette image allait prévaloir jusqu’au moment où il serait expédient de la modifier.
Les commerçants canadiens établis le long du Saint-Laurent dépendaient des produits agricoles et autres qui provenaient de l’intérieur des États-Unis, alors en plein développement. La construction du canal Érié détourna le commerce du Saint-Laurent vers la côte atlantique des États-Unis : les marchands canadiens abandonnèrent donc le commerce agricole de l’intérieur aux Américains, et durent chercher ailleurs. La poursuite du développement économique en Amérique britannique du Nord nécessitait l’exploitation d’une ressource économique servant de nouvelle frontière aux investissements. Les marchands canadiens s’intéressèrent alors à ce que l’ouest pouvait offrir : s’il affichait un potentiel agricole, le gouvernement devrait alors acheter la Terre de Rupert à la CBH et construire un chemin de fer transcontinental. Même avant la Confédération, il s’agissait là de problèmes d’importance. La législature canadienne et la Chambre des communes britannique discutèrent de la possibilité d’une colonisation agricole des Territoires du Nord-Ouest. En 1857, elles organisèrent des explorations afin d’évaluer les capacités économiques de la région. Le capitaine PALLISER, chef de l’expédition britannique, et le professeur HIND, chef de l’expédition canadienne, virent des limitations à toute entreprise future ; pour Hind, le manque de marchés constituait l’obstacle principal (voir PALLISER AND HIND EXPEDITIONS).
Après la Confédération de 1867, l’une des priorités consista à joindre le territoire de la Colombie-Britannique au Canada, ainsi qu’à obtenir les territoires à l’ouest des Grands Lacs. La Terre de Rupert fut achetée en 1868 pour $1,5 million, avec la garantie que la CBH conserverait 5% des terres de la ceinture fertile. Pour Sir John A. Macdonald, le premier dirigeant du Canada, il s’agissait ensuite d’établir une politique nationale de protection tarifaire. Cette politique, mise en place en 1879, était jugée nécessaire pour accomplir les objectifs économiques et politiques de la Confédération. Les produits manufacturés, des textiles aux machines agricoles, seraient fabriqués au Canada au lieu d’être importés de l’Europe et des États-Unis. L’étape suivante consistait à développer un marché pour ces produits. Surgit alors l’ouest du Canada, prêt à se remplir d’une population qui produirait les articles agricoles de base et les enverraient vers l’Europe par le Saint-Laurent. Ces produits manufacturés seraient payés par les revenus de l’exportation. La compagnie du CANADIAN PACIFIC RAILWAY (CPR) fut alors formée dans ce but.
Le CPR traversa la Saskatchewan en 1884 et fut complété en 1885. Il était à présent possible de faire venir des immigrants et d’exporter les produits qu’ils fabriqueraient. Le CPR et le gouvernement fédéral donnèrent de l’ouest une image de « terre promise », un jardin d’abondance où tous les besoins matériels seraient satisfaits. On se servit de cette image pour attirer des immigrants des régions colonisées de l’Amérique du Nord, ainsi que de l’Europe. La dépression économique internationale des années 1890 retarda cependant les opérations : le blé à bas prix en Grande-Bretagne, avec en plus les coûts de transport élevés (fret ferroviaire et maritime), voulait dire que le revenu net de la production de l’ouest serait insuffisant pour justifier un investissement. Les fermiers ne pourraient pas survivre, et l’infrastructure (routes, stockage de grains, écoles, etc) ne pourrait pas être financée. Cette leçon allait servir plusieurs fois, depuis la colonisation jusqu’à nos jours : quand le revenu net de l’agriculture ne couvre pas le coût de la production et de la commercialisation, les régions rurales des prairies se retrouvent incapables de maintenir l’infrastructure et de fournir de nouveaux capitaux à investir – et encore moins d’assurer un niveau de vie adéquat à leurs habitants.
Au début du 20ième siècle, la surcapacité et la conversion du fret océanique à la vapeur réduisit les tarifs à moins de la moitié de ce qu’ils étaient trente ans auparavant. Des taux d’intérêt peu élevés, ainsi que des prix plus avantageux pour le blé, firent que les conditions étaient mûres pour la colonisation de l’ouest. La prairie indigène fut convertie en terre d’assolement en moins de trente ans. Le blé (WHEAT) représentait la culture de base sur laquelle reposait l’économie des prairies, mais l’avoine, l’orge et le lin (OATS, BARLEY et FLAX) étaient également récoltés. Tout ceci prit place au sein d’une période d’expansion économique dans le Canada tout entier. L’arrivée de 2,5 millions d’immigrants dans les prairies provoqua une énorme demande de matériaux pour la construction de maisons, d’écoles, d’églises, d’installations de stockage des céréales, de chemins de fer secondaires, et de commerces, ainsi que pour la manufacture d’équipements ménagers. La politique nationale de tarifs élevés voulait dire que la majeure partie de la fabrication prenait place au Canada : les marchands de l’est profitaient de la politique fédérale, mais les tarifs d’importation imposaient des prix plus élevés aux fermiers des prairies.
Les variétés de céréales en existence n’étaient pas vraiment adaptées au climat de la prairie (CLIMATE) ou aux conditions de croissance. Pour faciliter le développement de l’économie agricole dans l’ouest et dans d’autres régions du Canada, le gouvernement fédéral passa la Loi sur les fermes expérimentales en 1886, dans le but de sélectionner des plants afin de soutenir la production agricole (voir AGRICULTURE CANADA RESEARCH STATIONS). Cinq centres de recherche, parmi lesquels celui de Indian Head (1887), furent établis au départ sous la direction de William Saunders. Son fils, CHARLES SAUNDERS, découvrit le blé Marquis en 1904 ; comme cette variété arrivait à maturité plusieurs jours avant les autres, elle les remplaça toutes rapidement. Le Marquis offrait également d’excellentes qualités de mouture, et devint donc la norme pour tout développement de nouvelles variétés. Le système de manutention et de transport des céréales (GRAIN HANDLING AND TRANSPORTATION SYSTEM) était un autre élément essentiel de l’économie agricole. Trois compagnies – CANADIAN PACIFIC RAILWAY, Canadian Northern Railway et GRAND TRUNK PACIFIC RAILWAY – rivalisèrent pour le transport des céréales en construisant des chemins de fer secondaires. Il fut bientôt évident qu’il y avait un excès de réseau : au début de la Première Guerre mondiale (WORLD WAR I) il y avait trois chemins de fer transcontinentaux, mais seul le CPR était financièrement sain. Faisant face à la faillite, le Grand Trunk Pacific et le Canadian Northern railway furent rachetés, avec l’Intercolonial, le Grand Trunk et le National Transcontinental, par le gouvernement fédéral, et devinrent le CANADIAN NATIONAL RAILWAY (CNR).
Les trois compagnies de chemins de fer de l’ouest encouragèrent les intérêts américains à construire des silos le long de leurs lignes ; parmi les intéressés on comptait la SEARLE GRAIN COMPANY, la NATIONAL GRAIN COMPANY, la FEDERAL GRAIN LTD, et McCabe. On forma également des entreprises céréalières canadiennes qui existent toujours : N.M. PATTERSON AND SONS GRAIN COMPANY, PIONEER GRAIN COMPANY, et PARRISH AND HEIMBECKER GRAIN COMPANY. A une époque il y avait plus de 100 compagnies céréalières ; la plupart fermèrent pour des raisons financières, et leur actif fut racheté par les grosses entreprises. La façon dont les compagnies céréalières et les chemins de fer facturaient leurs services de transport, de manutention et d’entrepôt était une question aussi importante pour les fermiers d’alors qu’elle l’est pour ceux d’aujourd’hui. En 1897 le gouvernement fédéral passa avec le CPR l’Accord de Crow’s Nest Pass (CROW’S NEST PASS AGREEMENT), qui fixait un maximum pour le fret ferroviaire des céréales allant des prairies à Fort William et Port Arthur (Thunder Bay), sur le lac Supérieur. Ce taux fit force de loi en 1926, et fut finalement appliqué aux céréales acheminées vers la côte ouest.
Quatre facteurs déterminent ce que le fermier reçoit pour des céréales livrées au silo : poids brut, emmagasinage et freinte, catégorie, et prix. Au début de la période de colonisation, déjà, les fermiers se plaignaient de la complicité existant entre les silos et les compagnies de chemins de fer. Ils décidèrent de réagir, et le gouvernement fédéral nomma deux commissions royales (en 1899 et en 1904), qui aboutirent d’abord à la Loi céréalière du Manitoba, puis à la Loi céréalière du Canada. Ces lois réglementaient l’industrie céréalière et contribuaient à résoudre les problèmes de pesée, de classement et d’emmagasinage. Aujourd’hui, la Commission céréalière canadienne (CANADIAN GRAIN COMMISSION) réglemente divers aspects de l’industrie céréalière.
Le système du marché libre fut appliqué à l’établissement des prix d’après le modèle américain, avec des marchés au comptant et à terme. La bourse de céréales et de marchandises de Winnipeg fut établie en 1887, pour faciliter d’abord le commerce en espèces, puis celui des contrats à terme pour le blé, la graine de lin, l’avoine et l’orge. Les compagnies céréalières avaient besoin de marchés à terme viables pour couvrir leurs achats auprès des fermiers. Les prix offerts aux fermiers (prix de la rue) étaient basés sur les prix quotidiens du marché à terme. Vu que le commerce à terme permettait la spéculation de la part d’intérêts extérieurs au commerce céréalier, les fermiers montrèrent de la méfiance envers ce mode de détermination des prix : ceci devint une question de grande importance pour les organisations d’agriculteurs et pour le mouvement fermier (FARM MOVEMENT) à ses débuts. E.A. PARTRIDGE, un fermier de la Saskatchewan, lança une action par l’intermédiaire de la Territorial Grain Growers Association (appelée plus tard Saskatchewan Grain Growers Association), en vue de former la première d’une série de compagnies de silos appartenant aux fermiers. Sous la direction de Partridge, la Compagnie des producteurs de céréales (GRAIN GROWERS GRAIN COMPANY, ou GGG) fut formée en 1906 ; elle finit par acquérir et construire tout un réseau de silos à travers les prairies.
Par l’intermédiaire de leurs organisations, les fermiers adressèrent une pétition aux gouvernements fédéral et provincial pour prendre possession de tous les silos primaires. Au lieu de cela le gouvernement provincial, obéissant aux recommandations d’une commission nommée dans ce but, offrit son soutien en garantissant des prêts bancaires aux fermiers qui désiraient construire leurs propres silos. C’est sur cette base que la Coopérative de silos de la Saskatchewan (SASKATCHEWAN CO-OPERATIVE ELEVATOR COMPANY, ou SCEC) fut formée en 1911. En 1917 la GGG fusionna avec la Coopérative de silos de l’Alberta pour former UNITED GRAIN GROWERS (UGG) ; la SCEC resta en dehors de ce regoupement. UGG porte à présent le nom de Agricore United, après sa fusion avec Agricore (groupes Alberta et Manitoba).
Les compagnies céréalières aux mains des fermiers contribuèrent à la résolution de beaucoup des problèmes existant entre agriculteurs et compagnies, mais elles ne résolurent pas le problème des prix. A cause de leurs dettes, les fermiers étaient forcés de vendre leur grain à la récolte, au moment où un marché engorgé faisait baisser les prix. Un groupe de fermiers, qui envisageaient la formation d’une agence de commercialisation monopolistique opérant dans leur intérêt et regroupant leurs céréales, élaborèrent le projet d’une Commission canadienne du blé (CANADIAN WHEAT BOARD, ou CWB). Après avoir suspendu le marché libre durant la Première Guerre mondiale et avoir installé une Commission de superviseurs céréaliers pour commercialiser le blé à prix fixe, le gouvernement fédéral confia au CWB la commercialisation de la récolte 1919-20 à la fin de la guerre. Sous l’égide du CWB, les fermiers reçurent un versement initial à la livraison, et on leur attribua un certificat de participation leur donnant droit au règlement du solde une fois que tout le blé aurait été vendu. Avec un marché favorable, le CWB offrit aux fermiers les meilleurs prix qu’ils aient jamais reçus. Mais le gouvernement fédéral ne conserva pas le CWB, et l’année suivante on revint au marché libre. Les prix chutèrent. Les fermiers, toujours méfiants envers le marché libre et ses spéculateurs, se lancèrent dans une campagne pour rétablir le CWB.
Suivant les recommandations d’une commission royale en faveur du marché libre, les fermiers formèrent un plan de regroupement avec contrats de cinq ans. La Coopérative de producteurs de blé de la Saskatchewan (Saskatchewan Co-operative Wheat Producers Limited) fut fondée en 1924 dans le but de commercialiser les céréales acquises sous ces contrats ; elle se joignit à des organisations similaires en Alberta et au Manitoba pour former en 1926 un bureau de vente central (Central Selling Agency). Ces trois coopératives finirent par se lancer dans les entreprises de silos. Quand la Central Selling Agency fit faillite en 1929 à cause de la chute du prix du blé au début de la Grande dépression (GREAT DEPRESSION), la mise en commun cessa ; mais la branche silos survécut et devint plus tard la SASKATCHEWAN WHEAT POOL.
En réponse à une forte pression politique de la part des agriculteurs, le gouvernement fédéral rétablit la Commission canadienne du blé (CWB) en 1935 afin de commercialiser le blé dans les prairies, en vertu d’un accord de mise en commun. Agissant d’abord comme une organisation bénévole, le CWB devint permanent en 1943. La bourse des céréales de Winnipeg abandonna le commerce du blé à terme. L’avoine et l’orge s’ajoutèrent aux activités du CWB en 1949 ; mais celui-ci se débarrassa des céréales fourragères en 1974, et de l’avoine en 1989. Le CWB a été périodiquement en butte aux attaques d’une minorité de fermiers, qui voudraient un système à deux régimes leur permettant de choisir comment écouler leur blé et leur orge. Il a récemment subi de nombreux changements, et une nouvelle loi a mis en place un conseil d’administration élu par les producteurs. Il a également introduit des alternatives qui permettent aux fermiers de fixer le prix de leurs céréales et donc d’échapper à la mise en commun. (Voir aussi AGRICULTURAL MARKETING.)
La table 1 décrit les changements qui ont pris place au 20ième siècle en ce qui concerne la surface en fermes et le nombres des fermes, les aires de cultures, et la jachère d’été (SUMMERFALLOW). Elle montre la rapidité de la colonisation : la surface cultivée passa de 3,8 à 28,6 millions d’acres de 1901 à 1911, tandis que la population passait de 91 000 à 492 000. Le nombre de fermes augmenta en conséquence, atteignant 96 440 en 1911. La surface en fermes, de 44 millions d’acres en 1921, passa à 56 millions en 1931. La population était de 757 000 en 1921, et de 922 000 en 1931. Le nombre de fermes atteint 136 472 en 1931. Avec 931 000 en 1936, la population de la Saskatchewan différait alors peu de celle d’aujourd’hui. Tandis que moins d’un million d’acres étaient cultivés en 1901, en 1911 il y en avait 9 millions, et en 1921 17 millions. Entre 1921 et 1941, 16 millions d’acres supplémentaires furent occupés. La terre cultivée n’augmenta pas en proportion, à cause d’une nouvelle procédure qui laissait la terre en jachère pendant un an : la superficie en jachère d’été augmenta de 8 millions d’acres entre 1921 et 1941.
D’importants changements prirent place après la Seconde Guerre mondiale. En contraste avec la stagnation économique des années 1930, où peu de machinerie agricole avait été adoptée, les fermiers aisés commencèrent à élargir leurs exploitations et à se mécaniser. Tandis qu’en 1921 seulement 15% des fermes déclaraient posséder un tracteur, ce chiffre passa à 29% en 1931, et à 81% en 1951.
Le nombre de fermes (138 173 en 1941) commença à décliner : en 1951 il y avait 26 000 fermes de moins, et ces chiffres ont continué à chuter pour atteindre 50 598 en 2001. Entre 1951 et 2001, la superficie moyenne des fermes est passée de 550 à 1 283 acres. L’autre changement important concerne la réduction de la jachère d’été, parallèle à l’augmentation de la surface cultivée ; mais ceci prit place surtout après 1990, en même temps qu’un mouvement vers la récolte continue et l’ensemencement sans labour.
Les changements dans la production végétale de la Saskatchewan entre 1921 et 2004 sont illustrés par la Table 2. Bien que demeurant la principale récolte, le blé de printemps ne domine plus la production comme auparavant : le blé dur, cultivé surtout dans les zones de sols brun et brun foncé, offre maintenant une autre alternative. Au temps où la plupart des activités agricoles utilisaient les chevaux, on cultivait l’avoine principalement pour leur alimentation ; mais quand ils furent remplacés par les tracteurs, la superficie plantée en avoine passa de 5,6 millions d’acres en 1921 à 510 000 acres en 1991. De nos jours, cependant, la demande en avoine comme nourriture pour les humains a provoqué un regain de production. Une plus forte demande en malt a également augmenté de façon considérable la superficie cultivée en orge, surtout depuis les années 1970 (voir MALTING INDUSTRY). Le seigle (RYE), une récolte d’importance secondaire, est devenu insignifiant, avec moins de 200 000 acres. Le colza (CANOLA) rivalise maintenant avec le blé de printemps comme récolte offrant le plus fort revenu. La culture spécialisée, qui comprend le triticale, la moutarde (MUSTARD), le tournesol, le millet (CANARYSEED), ainsi que les légumes secs tels que lentilles, pois secs et pois chiches, a pris de l’importance ces dernières années : elle couvre à présent une superficie de plus de 6 millions d’acres (voir PULSE CROPS AND INDUSTRY).
L’histoire du bétail et de la volaille dans la Saskatchewan depuis 1921 jusqu’à nos jours est illustrée dans la Table 3. Les chevaux et poneys, qui étaient plus d’un million au temps où les fermiers en avaient besoin pour leurs activités, sont maintenant utilisés pour les loisirs et ont vu leur nombre descendre à moins de 100 000 (voir HORSE INDUSTRY). L’élevage et l’industrie du boeuf (BEEF FARMING et BEEF INDUSTRY) ont fait passer le nombre du bétail de 1,2 million en 1951 à plus de 3 millions en 2003. L’élevage des moutons n’a jamais occupé une place importante dans la province, étant donné la préférence pour le boeuf, le porc et le poulet ; cependant, le nombre de moutons a récemment augmenté pour atteindre plus de 145 000 en 2003 (voir SHEEP FARMING AND INDUSTRY). L’élevage et l’industrie du porc (HOG FARMING et SWINE INDUSTRY) ont subi une transformation considérable, passant de la petite échelle au stage intensif ; mais la commercialisation réelle n’a pas augmenté autant que la productivité des fermes.
Le nombre de vaches laitières est descendu de 350 000 en 1921 à 34 000 en 2003, en même temps que l’élevage laitier et l’industrie laitière (DAIRY FARMING et DAIRY INDUSTRY) passaient par une importante transition. Un développement parallèle a marqué l’élevage et l’industrie des volailles, si bien que le nombre de poules et de poulets fermiers en 2001 était environ le tiers de ce qu’il était en 1931 et 1941 (voir POULTRY FARMING AND INDUSTRY). Ceci s’explique en partie par la spécialisation des fermes. Au début, la plupart avaient des vaches qui étaient traites pour les besoins domestiques ; le bétail était abattu pour la viande ; et la volaille fournissait ses oeufs et sa viande. Avec l’augmentation du revenu net et le nombre croissant de femmes travaillant en dehors de la ferme, les familles estimèrent qu’elles n’avaient plus à être autosuffisantes, et elles cessèrent d’élever des animaux pour leurs propres besoins alimentaires. Cette transition fut aussi influencée par le fait qu’il devenait plus facile de se procurer de la nourriture dans les régions rurales. De plus, avec l’introduction d’offices de vente gouvernés par l’offre, seules les fermes dotées de quotas ont le droit de commercialiser le lait, les oeufs, les poulets et les dindes. Les offices de vente en question sont le Bureau de contrôle laitier de la Saskatchewan (Saskatchewan Milk Control Board), les Éleveurs de volaille de la Saskatchewan (CHICKEN FARMERS OF SASKATCHEWAN), l’Office de vente des éleveurs de dindes de la Saskatchewan (SASKATCHEWAN TURKEY PRODUCERS’ MARKETING BOARD), et l’Office de vente des poulets à griller et des oeufs à couver de la Saskatchewan (SASKATCHEWAN BROILER HATCHING EGG PRODUCERS’ MARKETING BOARD). Les fermiers bénéficiant de la gestion planifiée de l ’offre ont sur les autres l’avantage d’avoir la garantie d’un rendu pour le travail accompli : l’office de vente fixe le niveau de production de façon à engendrer un prix qui couvre le coût moyen de cette production, ainsi qu’un rendu pour le travail fourni et pour sa gestion.
La Table 4 montre la situation économique des fermiers de la Saskatchewan de 1926 à 2003 ; tous les chiffres représentent des moyennes pour les périodes traitées. Le gain net réalisé par les fermes représente la circulation financière – marge brute d’autofinancement et avoir non liquide – attribuable à l’exploitation agricole ; il ne rend pas compte des changements de valeur de l’inventaire, qui lui est représenté par le « revenu net total », absent de cette table. Il est intéressant de traduire le revenu en dollars actuels : le gain net réalisé a donc été ajusté conformément à l’indice des prix canadien afin d’obtenir le gain net réalisé « réel », avec l’année 2000 comme index 100. Les années 1920 étaient favorables aux agriculteurs : le gain net réalisé pour les quatre années 1926-29 était en moyenne de $151 millions, et on commençait à se mécaniser et à acheter des tracteurs, des camions et des automobiles. Ceci prit fin avec la Grande dépression de 1929, et avec la sécheresse (DROUGHT) qui sévit sur les prairies dans les années 1930. Comme le montre la Table 4, la recette annuelle n’était en moyenne que de $103 millions, et le gain net réalisé de $8 millions seulement, dans les années 1930 ; les agriculteurs durent limiter leurs dépenses, et la mécanisation agricole cessa. Les revenus fermiers s’améliorèrent dans les années 1940, en partie à cause de la Deuxième Guerre mondiale. Le gain net réalisé, allant de $60 à $401 millions, était en moyenne de $243 millions ; il demeura relativement stable durant les années 1950 et 1960 – à l’exception de 1967 et 1968, époque à laquelle il déclina brutalement. Tandis que le gain net réalisé était en moyenne de $356 millions dans les années 1960, il oscillait autour de $776 millions dans les années 1970 ; cette augmentation correspondait aux prix élevés des céréales, dûs surtout à l’entrée de l’Union soviétique dans le marché du blé en tant qu’importateur de première importance. Le prix des terres augmenta considérablement à mesure que les fermiers cherchaient à agrandir leurs exploitations ; la valeur du capital agricole, comprenant terres, bâtiments, bétail et équipement, passa de $5,465 milliards en 1971 à $31,355 milliards en 1981. Les années 1980 représentent cependant un revirement complet de l’économie agricole : la recette demeurait élevée, mais l’augmentation du coût des intrants réduisit le revenu. Cette tendance a accéléré des années 1990 à nos jours. En 2003, le gain net réalisé battit un record, avec un niveau négatif de $390 millions.
En termes du pouvoir d’achat contemporain, les fermiers de la Saskatchewan sont plus appauvris depuis les années 1990 qu’à aucun autre moment depuis la colonisation, si l’on excepte les années 1930. Le gain net réalisé par ferme a été en moyenne de $7 900 pour 2001-03, de $9 890 pour 1991-2000, de $17 000 pour 1981-90, de $37 100 pour 1971-80, de $24 800 pour 1961-70, de $18 900 pour 1951-60, de $21 298 pour 1941-1950, de $800 pour 1931-1940, et de $13 000 pour 1926-30. Une estimation du rendu au capital fermier a été effectuée en prenant le gain net réalisé comme pourcentage de la valeur du capital fermier pour chaque période : sur cette base, le rendu au capital fermier, qui était en moyenne de 6% en 1971-80, est descendu à 2,3% en 1981-90, à 1,6% en 1991-2000, et à 1,2% en 2001-03. Ces chiffres montrent que l’agriculture dans cette province représente un vrai combat économique. En face du déclin du prix réel des céréales et du bétail, les fermiers ont dû agrandir et diversifier leurs exploitations, et aussi accroître leur efficacité en adoptant de nouvelles technologies, afin d’augmenter la production et de la rendre moins coûteuse. Tandis que quelques fermes sont devenues des exploitations spécialisées à grande échelle, d’autres ont misé leur survie sur le revenu venant de l’extérieur : près de trois quarts des revenus fermiers proviennent à présent de sources non agricoles.
L’agriculture est donc semblable à un tapis roulant : on y court de plus en plus vite, mais on n’arrive nulle part. Dans la plupart des industries où il existe relativement peu de firmes, celles-ci reconnaissent leur interdépendance ; quand le rendement net décline, la solution est donc de réduire la production et de maintenir ou d’augmenter les prix. C’est l’opposé qui se passe le plus souvent en agriculture : en face du déclin des revenus, une ferme cherche normalement à augmenter la production, considérant que c’est la seule façon de maintenir les revenus ; quand toutes les fermes agissent ainsi, cette augmentation de la production conduit tout droit à une diminution des prix.
De plus en plus de fermiers se tournent vers l’agriculture biologique – en partie pour réduire le coût des intrants chimiques (engrais, pesticides et herbicides), et en partie pour pratiquer des méthodes plus soucieuses de l’environnement (voir ORGANIC FARMING AND INDUSTRY). Un produit biologique se vend également plus cher qu’un produit ordinaire. Le rendement, par contre, est inférieur, mais la recherche en cours sur l’agriculture sans produits chimiques va sans doute réduire cet écart. La Saskatchewan est en tête des autres provinces pour les produits biologiques, qui consistent surtout en céréales et en graines oléagineuses. En 2004 il y avait plus de mille producteurs biologiques, avec à peu près 560 000 acres de terres cultivées. Bien que cette production soit exportée auc États-Unis, en Europe et au Japon, le secteur de traitement biologique est aussi en expansion.
Vu la population provinciale de moins d’un million et la vaste superficie nationale, l’économie agricole de la Saskatchewan s’oriente surtout vers l’exportation : plus de 40% de son produit intérieur brut en est dérivé. Dans une année moyenne, la province exporte environ $2 milliards de blé ; et les exportations de colza et de légumes secs atteignent une moyenne de $400 millions chacune. En 2002, les exportations d’animaux vivants se chiffraient à près de $400 millions, et la viande représentait $130 millions.
La Saskatchewan, comme les autres provinces des prairies, n’est pas connue pour ses industries de transformation, qui se sont surtout développées par rapport à l’agriculture. Les industries alimentaires (FOOD PROCESSING INDUSTRY) repésentent environ un tiers des expéditions de marchandises de la province. Il existe approximativement 300 centres d’industries alimentaires, qui emploient plus de 7 000 personnes et font annuellement des expéditions de $2 milliards. La meunerie (MILLING) domine, ainsi que le traitement de la viande, des graines oléagineuses, des légumes secs, et des produits laitiers. La plupart de ces industries sont à petite échelle : plus de 70% emploient moins de dix personnes.
L’industrie de la malterie consiste en une seule usine : Prairie Malt, à Biggar, qui fut construite en 1975 et appartient à présent à CARGILL LIMITED et à la Saskatchewan Wheat Pool. Elle traite 300 000 tonnes d’orge par an pour produire 230 000 tonnes de malt, dont 90% est exporté. Le programme de sélection de l’orge au Centre de développement des cultures (CROP DEVELOPMENT CENTRE) de l’Université de la Saskatchewan a produit plusieurs variétés qui ont contribué au succès de la malterie dans les prairies. L’industrie de brassage et de fermentation (BREWING AND FERMENTATION INDUSTRY) est l’une des plus anciennes entreprises de la province : le premier procédé de fermentation commença à Moose Jaw et Prince Albert en 1883. Bien qu’il ait existé plusieurs sociétés de brasserie, une seulement est encore en activité : la GREAT WESTERN BREWING COMPANY de Saskatoon. Depuis 1989-90, une vingtaine de cafés-brasseries ont ouvert leurs portes. Il y avait une distillerie à Weyburn : McGuiness (Central Canada), qui fonctionna jusqu’en 1987. Une compagnie de vignerons, la Growers Wine Company (auparavant Jordon’s Ste. Michelle), fonctionna de 1964 à 1981. Il existe maintenant deux vineries fruitières : Aspen Grove, à l’est de Régina ; et Bannach, à North Battleford. Une usine de vinaigre blanc, appelée à présent Reinhart Foods, existe depuis 1948.
La meunerie est également établie depuis longtemps. Avec des moyens de transport limités, de nombreuses minoteries ne tardèrent pas à se développer : dès 1915 il y en avait au moins trente-sept, et en 1935 cinquante-cinq, avec une capacité journalière combinée de 7 860 barils de farine. La plupart de ces minoteries étaient cependant petites : incapables de survivre dans un marché de plus en plus concurrentiel, elles durent fermer au milieu des années 1900. Il y a à présent trois grandes minoteries en Saskatchewan : J.M. Smucker (Canada) Inc. à Saskatoon, et Dawn Food Products à Saskatoon et à Humboldt. L’avoine est traitée dans deux usines (Can Oat à Martensville, et Popowich Milling à Yorkton), et les pois et les graines de lin par Parrheim Foods à Saskatoon et par Randolph et James Flax Milling à Prince Albert. Nutrasun Foods est une minoterie biologique en existence depuis 2000. Il existe aussi beaucoup d’autres petites usines de traitement des céréales et graines oléagineuses.
L’industrie alimentaire pour le bétail (LIVESTOCK FEED INDUSTRY) produit des composants d’alimentation évalués à $1,6 milliards. Les segments les plus importants de cette industrie produisent des récoltes à transformer en aliments pour animaux et volaille, dont les principales sont l’orge, le blé, l’avoine, les pois des champs et la farine de colza. On fabrique à la fois les aliments complets et les suppléments (protéine, vitamines et minéraux). L’industrie de la volaille est basée surtout sur le traitement à la ferme. Dans l’industrie du boeuf, seuls les suppléments sont normalement achetés : le fourrage représente plus de la moitié de l’alimentation des ruminants. De plus, des unités de déshydratation transforment la luzerne en pastilles pour usage domestique dans l’industrie du bétail et pour l’exportation.
Le traitement des graines oléagineuses commença à Moose Jaw, où une usine d’extraction pour le broyage du colza fut construite en 1945 – au départ pour produire un lubrifiant destiné à l’armée (voir OILSEED PROCESSING INDUSTRY). En 1946 la Saskatchewan Wheat Pool construisit à Saskatoon une usine pour extraire l’huile des graines de lin, auxquelles on ajouta l’huile de colza en 1949. Ces deux usines ont cessé d’opérer. En 1963, une unité fut construite à Nipawin pour broyer les graines de colza ; on y ajouta plus tard une raffinerie et une usine d’emballage pour produire des huiles végétales, de la margarine et du shortening (l’usine d’emballage a depuis été transférée à Edmonton). Pour obtenir un plein succès, le traitement de la graine de colza dut attendre qu’une nouvelle variété (appelée canola) soit acceptée comme source d’alimentation. En 1996, Cargill Limited construisit une usine de broyage du colza à Clavet, l’une des plus grandes en Amérique du Nord. Plusieurs petites unités de traitement spécialisées (BIORIGINAL FOODS, Goldburn Valley, et Science Corporation) sont maintenant en opération dans la province.
Quant aux fermes, l’industrie des outils agricoles (AGRICULTURAL IMPLEMENT INDUSTRY) fut développée en grande partie pour répondre aux besoins propres à la Saskatchewan. L’adaptation de la technologie à la terre et au climat concerna surtout le travail du sol et l’ensemencement. La fabrication se développa au sein d’une industrie dominée par plusieurs grandes compagnies de gamme étendue telles que John Deere, International Harvester, et la compagnie canadienne Massey-Harris, dont les prix et les pratiques de commerce n’étaient pas toujours acceptés par les fermiers. Le gouvernement de la Saskatchewan créa deux commissions, en 1915 et en 1939, pour examiner les pratiques de commercialisation de ces grandes compagnies ; une de leurs recommandations fut d’encourager pour l’équipement agricole un système de distribution en coopérative. Ceci mena à la formation en 1940 de Canadian Cooperative Implements Limited, qui en 1942 se lança également dans la fabrication d’équipement agricole. La plus grande partie de la fabrication développée dans les prairies prit place après la Seconde Guerre mondiale. En 1961 il y avait seulement cinq compagnies fabricantes d’équipement ; ce chiffre monta à 23 en 1971, et à 30 en 1981 – avec des ventes de l’ordre de $158 millions. Les ventes se chiffrèrent à $250 millions en 1991. En 2004, le nombre de firmes fabricantes d’équipement en Saskatchewan était de 89 ; en comparaison, le Manitoba, qui avait été dominant dans les prairies, avait à la même époque 83 firmes fabricantes d’équipement.
Comme il a été mentionné plus haut, les fermiers demandèrent réparation pour leurs problèmes économiques par une protestation politique exercée surtout par l’intermédiaire d’organismes agricoles créés dans cette intention. Le premier fut l’Association territoriale des producteurs de céréales (Territorial Grain Growers Association), rebaptisée Saskatchewan Grain Growers Association (SGGA) en 1905 à l’occasion de la fondation de la province. Quand la SGGA n’eut pas l’approbation des fermiers qui désiraient une démarche plus radicale, un nouvel organisme fut formé en 1921 : l’Union des fermiers du Canada (Farmers Union of Canada, ou FUC). La FUC et la SGGA fusionnèrent en 1926 pour former la United Farmers of Canada (UFC), section Saskatchewan.
Bien qu’en butte à une opposition portant sur de nombreuses questions, la Saskatchewan Co-operative Wheat Producers et l’UFC réussirent à établir un groupage coopératif. Elles invitèrent Aaron Sapiro, un homme de loi californien qui avait joué un rôle-clé aux États-Unis dans la formation de coopératives commerciales visant à la mise en commun. Sapiro, excellent orateur, fit campagne en Saskatchewan pour convaincre les fermiers de signer des contrats de cinq ans pour un organisme contrôlé par eux, et chargé de commercialiser leurs céréales sur la base du groupage au lieu de les vendre à des compagnies contre remboursement. La Saskatchewan Co-operative Wheat Producers (qui devint plus tard la Saskatchewan Wheat Pool) fit opposition à l’UFC alors que celle-ci militait pour le groupage obligatoire après la faillite de l’Agence centrale de ventes. En 1931 l’UFC, dotée d’une constitution amendée, participa à une nouvelle organisation politique : le Saskatchewan Farmer Labour Group, qui fit surface comme membre d’un nouveau parti politique, la CO-OPERATIVE COMMONWEALTH FEDERATION (CCF), sous la direction de T.C. DOUGLAS.
Tandis que la dépression ébranlait les organismes agricoles, l’UFC luttait pour conserver ses effectifs. Elle continua d’adresser des pétitions aux gouvernements, demandant des prix de parité et la mise en commun obligatoire – ce qui se matérialisa en 1935 avec la Loi canadienne sur la commission du blé. L’UFC devint en 1949 l’Union des fermiers de la Saskatchewan (SASKATCHEWAN FARMERS UNION, ou SFU), avec JOSEPH PHELPS pour président, et son militantisme s’accrut. La SFU succéda à l’UFC au Conseil interprovincial des unions agricoles (Interprovincial Farm Union Council, ou IFUC) ; en tant que président de l’IFUC, Phelps chercha à étendre les effectifs au Manitoba, à l’Ontario et à la Colombie-Britannique. En 1960, l’IFUC fut rebaptisée National Farmers Union Council (Conseil national des unions de fermiers). En 1962, ROY ATKINSON devint président de la SFU et président du Conseil national des unions de fermiers. En 1963 la SFU fit campagne pour un plan de commercialisation directe des porcs en Saskatchewan. Un mouvement similaire avait pris place en Ontario, au Manitoba et en Alberta. Après plusieurs contretemps, une commission de commercialisation des porcs fut établie en 1972, et à la suite d’un vote positif de la part des producteurs elle fut chargée de vendre les porcs à des prix fixés. Le gouvernement provincial supprima cette commission dans les années 1990.
La baisse des revenus fermiers en 1968 et 1969, dûe aux bas prix des céréales et à leurs surplus, incita la SFU à organiser un rassemblement de 6 000 fermiers à Saskatoon en avril 1969. Le 14 juillet il y eut également une manifestation de quatre jours, pendant laquelle les fermiers bouchèrent les routes de la Saskatchewan avec leurs tracteurs ; ces actions contribuèrent au congrès constitutif de l’Union nationale des fermiers (National Farmers Union, ou NFU) à Winnipeg les 30 et 31 juillet 1969.
La Fédération canadienne de l’agriculture (Canadian Federation of Agriculture, ou CFA) fut formée en 1935 dans le but de faire face aux problèmes agricoles avec une seule voix. A la différence de la NFU, la CFA était un groupe d’encadrement représentant les organisations agricoles provinciales et les groupes spécialisés. En Saskatchewan, le conseil de coopératives qui avait été formé en 1928 devint en 1944 la Fédération agricole de la Saskatchewan (SASKATCHEWAN FEDERATION OF AGRICULTURE, ou SFA) ; la SFA croyait fermement que les organisations agricoles devaient travailler ensemble au développement et à la promotion des politiques provinciale, nationale et internationale pour assurer le bien-être des familles agricoles. Après 1966, la SFA avait plus de quinze organismes membres, parmi lesquels des cooperatives, des offices de vente, des groupes spécialisés, ainsi que des groupes municipaux et des associations féminines. Il existait une étroite affiliation entre la SFA et la Saskatchewan Wheat Pool, et plusieurs des vice-présidents de cette dernière servirent comme présidents de la première. La SFA offrait son soutien au Conseil canadien du blé et aux accords internationaux sur le blé, mais les organismes membres n’étaient pas toujours unanimes sur certaines questions de politique – surtout en ce qui concernait la commercialisation – et la tension entre les membres mit fin à la SFA.
Les préoccupations politiques des fermiers ont été représentées par d’autres organismes généraux. L’Association des récoltants de blé de Palliser (Palliser Wheat Growers Association) fut fondée en 1970 en tant qu’organisation agricole bénévole sans but lucratif, chargée de représenter les intérêts des fermiers auprès des gouvernements et des autres secteurs agricoles. Son nom fut changé en Western Canadian Wheat Growers Association en 1985 ; mais la baisse des effectifs la força à cesser ses opérations dans les années 1990, pour être reformée en 2004. Un autre organisme agricole général, l’Agricultural Producers Association of Saskatchewan (APAS), fut formé en 2000 dans le but de donner aux fermiers et aux propriétaires de ranchs une organisation de producteurs impartiale, élue démocratiquement, et basée sur les circonscriptions municipales.
En plus des organismes agricoles généraux, il existe de nombreuses organisations qui se bornent à représenter spécifiquement des produits agricoles ou des questions de gestion, bien que certaines, qui ont pour but principal le prélèvement des cotisations destinées à soutenir la recherche et la communication, ne soient pas impliquées dans les questions de politique. Ces organismes, qui fonctionnent sous couvert de la Loi agro-alimentation de la Saskatchewan et de son conseil, comprennent : le Conseil de développement des légumes-grains, la Commission de développement du lin, l’Association des récoltants de colza, les Récoltants de céréales d’hiver, l’Association pour la conservation du sol, le Conseil canadien du lin, l’Association du bison de la Saskatchewan, l’Association des éleveurs d’élans, l’Association des éleveurs de cerfs, l’Association du renne de la Saskatchewan, le Directoire biologique de la Saskatchewan (SASKATCHEWAN ORGANIC DIRECTORATE), et bien d’autres. En ce qui concerne le bétail, l’Association des éleveurs de bétail de la Saskatchewan (Saskatchewan Stock Growers Association, ou SSGA) est un organisme sans but lucratif, établi en 1913, qui présente un front uni au niveau législatif ; il s’agit là de la filiale provinciale de l’Association bétaillère du Canada (Canadian Cattlemen’s Association, ou CCA).
Comme il en était avec l’Acte de l’Amérique du Nord britannique, la Constitution canadienne rend les deux niveaux de gouvernement responsables de la politique agricole : la province est en général responsable au niveau local, tandis que le gouvernement fédéral s’occupe des questions nationales et internationales. Quand les problèmes se recoupent, les deux gouvernements oeuvrent ensemble – comme ils le font pour la plupart des programmes de sécurité du revenu. Ils ont tendance à créer des politiques et des programmes qui répondent au besoin du public pour une intervention, ainsi qu’aux pressions des groupes à intérêt commun : d’où la myriade d’organismes agricoles cités plus haut. Les politiques agricoles provinciales émanent du Ministère de l’agriculture, de l’alimentation et de la revitalisation rurale. Elles tendent à se concentrer sur les droits de propriété agraire, et soutiennent les fermiers à l’aide de prêts, de concessions, et de programmes tels que la stabilisation des revenus ; elles soutiennent aussi la recherche, l’assurance des récoltes, et la valorisation de la technologie. Comme exemples nous avons la Loi sur la sécurité des terres (Farmland Security Act), passée en 1974 pour réglementer la propriété agraire, et le Programme de crédit foncier (Land Bank) introduit au début des années 1970 pour aider au transfert intergénérationnel des terres ; ce dernier fut supprimé par les Conservateurs quand ils vinrent au pouvoir en 1982.
Un exemple de programme combiné est offert par l’Assurance-récoltes Canada-Saskatchewan (Canada-Saskatchewan Crop Insurance), qui subventionne les primes et les coûts administratifs. La province est également impliquée dans des programmes destinés à augmenter les revenus agraires. Parmi ceux-ci on a compté la Stabilisation du revenu net (Net Income Stabilization, ou NISA) et le Programme d’assurance du revenu brut (Gross Revenue Insurance Program, ou GRIP), qui ont tous deux été éliminés ; il s’agissait là des premiers programmes où le gouvernement provincial épaulait le revenu des fermes. L’Assurance canadienne du revenu agraire (Canadian Agricultural Income Assurance, ou CAIA), qui remplace NISA, a commencé avec l’année de récolte 2003-04. Un autre exemple est le Programme canadien d’adaptation et de développement rural en Saskatchewan (Canadian Adaptation and Rural Development in Saskatchewan, ou CARDS), qui a bénéficié d’un financement fédéral. La première attribution d’argent à la province de la part du gouvernement fédéral fut de $8,8 millions, répartis sur quatre ans ; la deuxième fut de $11,3 millions pour 1999-2003 ; et le programme CARDS a été prolongé jusqu’en mars 2006.
La province a offert aux secteurs céréalier et bétailler son soutien pour les prix et les revenus. Comme exemples, datant tous deux des années 1970 : le programme de stabilisation du boeuf, et celui du porc. Dans les années 1980 ces deux programmes furent amalgamés dans le Programme national tripartite de stabilisation ; mais ils furent éliminés dans les années 1990 à cause des mesures de compensation du gouvernment américain. La Farmstart Corporation démarra en 1973 avec pour but de fournir du crédit et des concessions pour le développement des secteurs du bétail et de la volaille, ainsi que de l’irrigation. Farmstart devint la Corporation de crédit agricole de la Saskatchewan (Agricultural Credit Corporation of Saskatchewan, ou ACS) en 1984, et le siège social passa de Régina à Swift Current. Le programme antérieur avait des composants de crédit et de consultation, et responsables des prêts et agronomes travaillaient ensemble sur le terrain ; il y eut ensuite une évolution vers une fonction principalement de crédit, jusqu’à la décision gouvernementale d’éliminer progressivement l’ACS en 1996 (voir FARMSTART CORPORATION AND THE AGRICULTURAL CREDIT CORPORATION).
En Saskatchewan, l’éducation agricole a en général pris place au niveau du collège et de l’université. Bien que présente dans l’enseignement public, l’agriculture n’y a jamais joué un rôle prépondérant. En 1994 le programme Agriculture in the Classroom Saskatchewan fut établi afin d’aider les élèves à acquérir une certaine compréhension de la complexité et de l’importance de l’agriculture. Ceci a été accompli par l’intermédiaire d’un partenariat entre éducateurs, agro-industries et organismes agricoles. Le programme fournit aux enseignants des ressources documentaires : des composants agricoles font partie de plusieurs sujets dans le curriculum, et il existe maintenant un cours Ag 20 au niveau secondaire.
Trois collèges de l’Université de la Saskatchewan offrent des programmes dans le domaine de l’agriculture : ceux d’Agriculture et d’Ingénierie, et le Collège de médecine vétérinaire de l’ouest. Le Collège d’Agriculture était l’un des deux collèges fondés en 1909 ; depuis lors, l’enseignement et la recherche en agriculture ont constamment été des points forts à l’Université, et le transfert pratique de cette recherche vers les producteurs a joué un rôle important dans le développement de l’agriculture dans l’ouest du Canada. Il y a maintenant environ 1 000 étudiants de deuxième et troisième cycle, ainsi que 350 employés comprennant le corps professoral, les chercheurs, et le personnel de soutien administratif et scientifique. Cinq départements (Agro-économie, Science Animale et Avicole, Microbiologie Appliquée et Science Alimentaire, Phytotechnie, et Pédologie) forment, avec leur recherche et leurs unités de service et d’éducation permanente, l’un des principaux centres de formation du Canada en sciences de l’agriculture et en éducation commerciale. L’apprentissage à tous les niveaux est disponible dans une vaste gamme de spécialisations. Le Collège d’Agriculture a un budget annuel de $38 millions (2003-04), provenant d’un grand nombre de sources.
En dehors de la recherche entreprise par ses divers départements, le Collège possède plusieurs autres centres : le Centre de développement végétatif (CROP DEVELOPMENT CENTRE), le Centre porcin des prairies (PRAIRIE SWINE CENTRE), le Centre de développement bovin, le Centre d’études en agriculture, droit et environnement (CENTRE FOR THE STUDIES IN AGRICULTURE, LAW AND THE ENVIRONMENT, ou CSALE), le Centre de recherche pédologique de la Saskatchewan, et le Centre de ressources en terres. En plus du Centre d’alimentation, le Laboratoire de recherche sur la viande et le Centre de nourriture pour animaux des prairies offrent de l’aide technique et autre à l’industrie agricole de la province.
Le Collège de médecine vétérinaire de l’ouest fut établi à l’Université de la Saskatchewan en 1964, suite à une décision des représentants de l’Université, des gouvernements des quatres provinces de l’ouest, et du gouvernement fédéral. La première classe entra au Collège en 1965 et obtint son diplôme en 1969.
Le Collège possède cinq départements : Sciences cliniques pour grands animaux, Sciences cliniques pour petits animaux, Microbiologie vétérinaire, Pathologie vétérinaire, et Sciences biomédicales vétérinaires. Il y a un hôpital d’enseignement vétérinaire, et des cours conduisent au diplôme de docteur en médecine vétérinaire (DVM) ; de plus, les cinq départements offrent des programmes aux niveaux de la maîtrise et du doctorat. Il y a actuellement 281 étudiants de license. Les installations de recherche comprennent plusieurs laboratoires individuels répartis parmi les cinq départements : la ferme Goodale offre les équipements nécessaires pour le bétail, les chevaux, les bisons, les élans et les cerfs ; le service de soins fournit l’hébergement et les soins à une vaste gamme d’animaux de recherche tels que rongeurs de laboratoire, lapins, chiens, chats, oiseaux, visons, moutons, chevaux et bétail ; le Centre de performance du cheval est équipé d’un tapis roulant à grande vitesse et d’une plaque de compression pour l’étude des paramètres locomoteurs et autres. Au cours de sa brève histoire, le Collège a acquis une dimension internationale dans les domaines de la reproduction animale, des maladies infectieuses, de la toxicologie, et de la santé de la faune sauvage.
L’Université de la Saskatchewan commença à offrir des cours d’ingénierie en 1912, et le Collège d’ingénierie fut établi en 1921. Il comprend cinq départements : Génie agricole et bioressources, Génie chimique, Génie civil et géologique, Génie électrique, et Génie mécanique. Au cours de l’année 2002-03, 1 395 étudiants du premier cycle et 272 étudiants diplômés étaient inscrits au Collège d’ingénierie. Le département de Génie agricole et bioressources fonctionna comme département de génie agricole jusqu’en 1992, date à laquelle un nouveau titre réfléta son programme élargi d’enseignement et de recherche. La spécialisation du département en Génie mécanique, autrefois un programme populaire au Collège, a été éliminée.
Des spécialisations en éducation agricole existent sur les quatre campus du SASKATCHEWAN INSTITUTE OF APPLIED SCIENCE AND TECHNOLOGY (SIAST). Le Kelsey Campus, à Saskatoon, offre des programmes en techniques de machinisme agricole, biotechnologie, politiques alimentaires et nutritionnelles, accessoiriste et technicien pour la compagnie John Deere, transformation des viandes, et technologie vétérinaire. Le Wascana Campus de Régina offre des programmes en gestion du bétail, apiculture, moissonneuses hors-série, études équines, et techniques de production du porc.
Les programmes de perfectionnement ont joué un rôle éducatif important en agriculture et dans les communautés rurales. Afin d’aider les immigrants à échanger de l’information, des sociétés agricoles furent formées par une loi passée par la Législature des Territoires du Nord-Ouest en 1884. En 1905 le premier Ministre de l’agriculture, W.R.MOTHERWELL, mit en place un service de perfectionnement par l’intermédiaire de l’Agence des foires et institutions. Avec la décision de situer le Collège d’agriculture au sein de l’Université de la Saskatchewan à Saskatoon, un accord fut conclu en 1910 entre Motherwell et l’Université, par lequel cette dernière se chargeait du travail éducatif en agriculture (y compris le perfectionnement), tandis que la province était responsable de l’administration et de l’inspection. Il y a plus de 90 ans, des « Trains pour une meilleure agriculture » commencèrent à apporter leurs programmes aux régions rurales ; plus de 40 000 contacts furent ainsi établis la première année. Dans ce programme, qui resta en vigueur de 1914 à 1922, les trains promenaient expositions et présentations, et étaient dotés de wagons de cours et même de wagons de garderie pour les jeunes enfants. En 1929, l’Université de la Saskatchewan se mit à offrir des cours par correspondance pour permettre aux étudiants ruraux de suivre des cours de douxième année et de niveau universitaire ; de nos jours, elle offre un programme de Certificat agricole en production végétale et en gestion agricole. D’autres programmes conduisent à un certificat en horticulture des prairies, et à une maîtrise de jardinage. (Voir UNIVERSITY EXTENSION, UNIVERSITY OF SASKATCHEWAN.)
En 1913, dans le but de créer un lien entre les immigrants et le Ministère de l’agriculture à Régina, le gouvernement recruta quatre représentants régionaux et les posta dans les régions rurales. Ce programme fut éliminé en 1923. Ce n’est qu’en 1945 que la province le rétablit sous couvert de la Loi sur les représentants agricoles, et créa la branche de ce nom au Ministère de l’agriculture. Ces représentants, appelés « Ag Reps », étaient en général des généralistes qui offraient aux fermiers et aux populations rurales renseignements et conseils portant sur l’agriculture et le jardinage, ainsi que sur les politiques et programmes gouvernementaux. Il y avait alors environ quarante représentants dans la province. Au milieu des années 1970, les services de perfectionnement furent réorganisés en six régions, et trois spécialistes agricoles furent recrutés pour chacune d’entre elles : en gestion agricole, en sols et cultures, et en bétail. Il y avait en plus six ingénieurs de fermes, qui se consacraient davantage au génie agricole (maintenant Génie agricole et bioressources).
Le programme universitaire de perfectionnement a subi des changements qui reflètent les besoins d’information des populations rurales, et a donc suivi l’évolution des technologies de l’information. A la fin des années 1980 les services d’extension, afin de faciliter la diversification de l’économie agricole, devinrent une agence de partenaires pour la création d’un réseau de 52 centres de services ruraux. Ces centres comprenaient d’autres programmes tels que l’Agence agraire et l’Assurance des récoltes ; les « Ag Reps » furent rebaptisés « Agrologues de perfectionnement » et reçurent de plus amples responsabilités afin d’améliorer la diversification par l’intermédiaire des nouveaux Conseils de développement agricole et de diversification. En 1993, la province établit le Module de commerce agricole au sein du Collège d’agriculture de l’Université de la Saskatchewan, dans le but de commercialiser les nouvelles technologies pour la création d’entreprises agricoles à plus grande valeur ajoutée.
Le 31 mars 2004, les services d’extension qui avaient eu pour mission d’épauler la production agricole dans toute la Saskatchewan furent éliminés et remplacés par un Centre des connaissances agricoles, situé à Moose Jaw et doté d’un personnel spécialisé dans divers domaines. Il y a maintenant neuf centres régionaux dans les régions rurales, dont le mandat est d’aider la commercialisation de l’agriculture, et donc le développement d’entreprises à valeur ajoutée.
L’exploitation et l’économie agricoles contemporaines ne sont pas ce que les pionniers de la Saskatchewan avaient envisagé. Ils rêvaient d’une province fortement peuplée, avec des communautés rurales florissantes : personne ne pouvait prévoir le développement des technologies d’équipement agricole, ni celui des technologies chimiques et biologiques permettant l’agriculture à l’échelle de celle du 21ième siècle. Le nombre de fermes et de fermiers a chuté. En 1906, 82% de la population était rurale ; en 1951 le chiffre était passé à 70% ; et en 2001 il était descendu à 36%. La plupart des villes et des villages ruraux voient leur population, et par conséquent leur commerce, décroître continuellement.
La Saskatchewan fut développée dans le but de devenir une « corbeille à pain » qui fournirait à la Grande-Bretagne et aux autres pays européens le blé et autres céréales qu’ils ne pouvaient produire eux-mêmes. Dans les quarante dernières années, depuis l’apparition d’une politique agricole commune au sein d’une Europe intégrée, l’Union européenne est devenue une importante exportatrice de produits agricoles et a forcé les autres « corbeilles à pain » (Etats-Unis, Australie et Argentine) à trouver de nouveaux marchés. Ces derniers se situent dans les régions défavorisées où la croissance démographique continue – contrairement aux pays développés, où elle s’est stabilisée. Mais le taux de natalité des pays sous-développés est en baisse, et ceux-ci ont plus de facilité à subvenir à leurs besoins alimentaires. On peut donc se poser les questions suivantes : Y a-t-il d’autres usages pour la capacité de surplus agricole de ces « corbeilles à pain » ? La pénurie de combustibles fossiles va-t-elle amener les céréales à devenir l’une des nouvelles sources d’énergie ?
La tragédie de l’agriculture est que, tandis que les fermes ont augmenté leur surface et leur productivité, leurs revenus ont eu tendance à décliner au cours des vingt-cinq dernières années. Avec leurs nombres réduits, les fermiers, qui autrefois avaient une influence politique au niveau national, ont maintenant bien peu de pouvoir. Le soutien du gouvernement pour l’agriculture baisse continuellement. Le gouvernement fédéral élimina en 1995 la subvention Crow Rate, d’une valeur d’environ $400 millions pour les agriculteurs de la Saskatchewan, qui maintenant paient ce montant en transport ferroviaire. Occasionnellement, le gouvernement fédéral offre encore des versements spéciaux à l’agriculture, mais surtout en cas de crise – comme par exemple pour l’encéphalopathie bovine (« maladie des vaches folles ») qui frappa l’industrie du boeuf en 2004. Les gouvernements fédéral et provincial n’ont pas abouti à une solide politique concernant la stabilisation et le soutien des revenus, en comparaison avec les Etats-Unis et l’Union européenne. L’agriculture des prairies serait-elle retournée à la période précédant la colonisation, où le prix des céréales, joint au coût du transport et des intrants, rendait la colonisation peu rentable ? Autrement dit, l’agriculture de la Saskatchewan aurait-elle décrit un cercle complet ? On peut suggérer que si la colonisation n’avait pas déjà été réalisée, elle ne pourrait prendre place dans les conditions économiques actuelles.
Quel est donc l’avenir de l’agriculture dans cette province ? Avec le déclin mondial du prix d’achat réel des produits agricoles et des aliments dans les 140 dernières années, il est difficile d’être optimiste et d’espérer une montée des prix. Les fermiers sont coincés entre les coûts et les prix, vu que le coût des machines agricoles et d’autres intrants consommateurs d’énergie continue à augmenter en même temps que le prix du pétrole. Quand les prix baissent, et donc les revenus, les fermiers cherchent à agrandir leurs exploitations, ce qui entraîne un nouveau déclin du nombre de fermes et une nouvelle détérioration des communautés rurales. Si la superficie moyenne des fermes passait à 5 000 acres, ce qui est faisable grâce à la technologie moderne, le nombre de fermes tomberait à environ 12 000, comparé à 50 000 actuellement. Avec moins de fermes et une population rurale réduite, il faudrait trouver de nouveaux moyens d’offrir les services d’éducation, de santé, et autres.
Dans ce contexte pessimiste, des fermiers trouvent cependant le moyen de survivre et même de prospérer. Ce sont les innovateurs, qui cherchent et trouvent de nouvelles récoltes, établissent de nouvelles entreprises, se débrouillent pour réduire les dépenses, et découvrent de nouveaux marchés. Voilà comment est l’agriculture de cette province depuis cinquante ans ; il est difficile d’envisager un avenir vraiment différent.
Contributor: Gary Storey
Translated By: Patrick Douaud
Fowke, V. 1957. The National Policy and the Wheat Economy. Toronto: University of Toronto Press.
Schmitz, A., H. Furtan and K. Baylis. 2002. Agricultural Policy, Agribusiness, and Rent-Seeking Behaviour. Toronto: University of Toronto Press.
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